Elle fait quoi Anna? Elle est où Anna?
À la demande générale, je crois qu’un petit topo sur mon plan de match pour l’hiver et le printemps s’impose. Je n’ai pas écris depuis un petit moment, mais ce n’est pas par manque de choses à écrire. Je n’ai tout simplement pas pris le temps de le faire et j’en suis désolée pour ceux réclamant des nouvelles. Par où commencer, ou plutôt par où recommencer? Bon, vous vous en doutez surement, je suis revenue de Vancouver. Ce fut extraordinaire de refaire la route en sens inverse et de voir les rocheuses version hiver cette fois. J’ai passé un Noël incroyable en famille et un mois de janvier de rêve à Montréal à prendre le temps de vivre et à profiter de la ville et de mes amis. J’ai même eu le temps de participer au parlement jeunesse du Québec ainsi qu’au jeune conseil de Montréal. Ce fut génial. Mais c’est la suite qui vous intéresse n’est-ce pas? A-t-elle choisi d’aller en Iran finalement? Est-elle en Australie ou encore au Népal? Ben non… je passe le mois de février au Liban pour faire un stage de médecine en urgence. Ensuite, pour vous donner les grandes lignes, je pars rejoindre Mathieu en Jordanie où on prendra des cours d’arabe. On visite ensuite la Jordanie jusqu’à la mi-mars. C’est ensuite le tour d’Israël d’avoir l’honneur de notre présence pour une semaine ou 2. Cela nous amène ensuite à Istanbul vers le début Avril où je dirai au revoir à Mathieu pour terminer ma visite de la Turquie en solo. Puis, contraste immense, je me téléporte à Genève le 18-20 avril pour le Global Health forum de Genève où je présenterai mon projet INcommunity sur les stages en populations négligées. La suite reste encore nébuleuse, n’étant pas capable de me projeter aussi loin dans l’avenir pour l’instant. La seule contrainte que j’ai est d’être revenue à Montréal pour le 28 mai, car je commencerai mon stage de réinsertion en gastrologie à l’hôpital Notre-Dame (En passant, je suis donc à la recherche d’une chambre meublée à Montréal pour le mois de mai :p On jase). Donc si vous avez des suggestions à me faire pour occuper mon temps après Genève, ou encore envie de venir me rejoindre pour voyager quelque part dans l’univers avec moi, faites moi signe J!

Anna prend l’avion avec royal Jordanien (Montréal- Amman –Beyrouth)
À peine dans la file pour enregistrer ma valise, j’étais déjà la minorité visible. Dans l’avion, c’était comme si j’étais déjà en Jordanie. Journaux, musique, repas et films arabes étaient au rendez-vous! Fidèle à mes bonnes vielles habitudes, j’ai dormi sans interruption les 11h00 de vol séparant Montréal d’Amman (bon… ok… ma voisine ouvrait parfois le hublot de façon démesurément excitée en me passant par dessus ce qui inévitablement me réveillait mais je me rendormais toujours). Cette même voisine parlait strictement arabe, mais voulait à tout prix communiquer avec moi. Ayant été aussi loin que le langage des signes et ses 3 mots d’anglais nous permettaient d’aller, son amie eu la gentillesse de nous servir de traductrice et c’est ainsi que nous réalisâmes que nous nous rendions ensuite au Liban sur le même vol. Dans notre 2e avion, elle entrepris de parler à tous les gens parlant également français (beaucoup de gens parlent 3 langues au Liban, d’où ce choix de destination pour mon stage) pour trouver quelqu’un pour me reconduire jusqu’à mon hôtel. En un rien de temps, l’avion au grand complet savait où j’allais dormir ce soir là et les gens argumentaient itinéraires pour savoir qui aurait la chance de me reconduire. J’avais beau leur dire que je m’en sortirais comme une grande avec un taxi, il y avait consensus sur le fait que je ne quitterais pas l’aéroport toute seule. Impression numéro 1, les libanais sont accueillant J.

Anna au Liban
À mon arrivée, il faisait noir. À défaut de pouvoir voir Beyrouth, je l’ai senti. C’était un vague mélange de l’odeur qu’a la banlieue de Paris et la Bolivie… Pour tout vous dire, je ne trouvais pas ca très prometteur. J’étais vaguement déprimée, il pleuvait, il faisait froid, j’étais malade ma vie et comme mon stage commençait seulement 4 jours plus tard, je me demandais ce que j’allais bien foutre là. J’étais également inconsciemment un peu stressée je crois. Je portais en moi toutes les craintes et appréhensions que ma famille et mes amis avaient par rapport à mon voyage et ca m’a pris un moment avant de baisser mes gardes si je peux m’exprimer ainsi. Non, le Liban n’est pas plus dangereux que d’autres destinations préalablement visitées dans ma vie (je ne parle pas ici du contexte politique, mais bien de la sécurité des lieux). Non, il ne m’est pas plus difficile de voyager au Liban en étant une fille seule que de voyager dans d’autres destinations préalablement visitées dans ma vie (pour tout vous dire, je me faisais d’avantage siffler dans la rue au Pérou qu’à Beyrouth). J’ai appris à apprivoiser les lieux, à faire confiance aux gens, le soleil est revenu, j’ai arrêté de vomir, je me suis faite des amis et tout a commencé à mieux aller. Impossible de rester toute seule! J’ai rencontré des gens à mon auberge de jeunesse et des amis d’amis d’amis… bref, en 4 jours je suis sorties 3 fois incluant une soirée karaoké (Où j’ai bien entendu chanté ‘’because of you’’ the kelly Clarkson en hommage à René, Marc, Emy et Mathieu et à une célèbre soirée dans un bar gay de Chicoutimi). Et progressivement, j’ai réussi à m'approprier la ville et à la trouver belle. Au début, je la trouvais laide par toutes ces contradictions. Je la trouvais hypocrite avec son centre-ville réaménagé en centre super chic et huppé pour faire oublier aux gens la guerre civile. Je la trouvais sale et snobe et faussement occidentale. Maintenant, c’est ces contradictions qui font que j’aime Beyrouth. Maintenant Beyrouth a sa propre odeur à elle. J’ai découvert le quartier étudiant et le quartier plus bohème avec des restaurants et des café sympa et le magnifique campus de AUB (American University of Beirut). J’ai même trouvé des libanais hipster en allant voir un film au festival d’Ingmar Bergman, le réalisateur suédois. Et plus je lis et je discute avec les gens de l’histoire du Liban, plus je suis fascinée de leur volonté de renaitre et de l’état des lieux après 15 ans de guerre civile et tout le reste. Mais il reste encore tellement d’aberrations, car les choses n’ont pas progressé au même rythme dans tous les secteurs étant donné la situation. L’état des routes ou plutôt de la circulation est un parfait exemple… Et je devrai définitivement vous faire un topo sur l’électricité ahahah! J’ai jamais vue un bordel pareil.
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Port de Byblos |
Anna et l’électricité
C’était trop tentant! Je dois vous parler de l’électricité tout de suite! Au Liban, le gouvernement est déficitaire en, croyez le ou non, ÉLECTRICITÉ! Il ne peut donc pas fournir de l’électricité à tout le monde en même temps et fait des rotations. Beyrouth peut alors avoir de l’électricité de 23h00 à 6h00 par exemple pour que ce soit ensuite le tour des campagnes et des banlieues. Les gens ont donc également des abonnements à de l’électricité de groupe par immeuble et ont des génératrices individuelles, question d’être capable d’avoir toujours un peu d’électricité. Seulement, quand ils n’ont pas accès à l’électricité du gouvernement, le nombre d’ampères est limité. Il faut alors arrêter de faire chauffer l’eau pour la douche si on veut brancher le sèche cheveux ou encore débrancher le réfrigérateur pour allumer le micro-onde, appareille énergivore par excellence qui a fait tout sauter à quelques reprises. Mais quand on a enfin l’électricité du gouvernement, c’est party time! En avant le lavage et le chauffage et la cuisine et la télévision et en veux-tu en v’la de l’énergie! C’est très nouveau et spéciale pour moi, car d’habitude quand je voyage, j’ai tendance à devenir très consciente de la quantité d’eau que je consomme. Faire attention à la quantité d’électricité que j’utilise, c’est la première fois que ca m’arrive avec une telle intensité. C’est un sujet très d’actualité au Liban en ce moment. Les gens sont découragés d’être au 21e siècle et de devoir calculer leur branchement électrique pour se permettre de brancher leur grille-pain sans faire tout sauter… Bref, le Liban, ca ressemble beaucoup à l’Intermed, le café étudiant de médecine ;)!
Anna fait de la natation
Le campus de AUB où je fais mon stage est génial! Il fait très vielle Université américaine et il donne sur la mer. Leur piste d’athlétisme à la plus belle vue, mais malheureusement, mon genou m’empêche toujours de courir L. Moi qui voulais refaire le demie-marathon d’Ottawa, ca augure mal… Mais ne reculant devant rien et ayant une soif incontrôlée d’endorphine, j’ai finalement trouvé la piscine et réussi à y aller sans payer en jouant mon meilleur personnage d’entre tous, j’ai nommé la naïve anonyme (mouahahah). C’est donc ma petite routine pour l’instant d’aller nager après l’hôpital et ca fait un bien immense.
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Campus de AUB avec vue sur la mer |
Anna habite… partout et nulle part.
Après mes 5 jours à l’auberge de jeunesse, je devais finalement intégrer les résidences. Comme elles n’étaient pas prêtes (bien évidemment), j’ai habité pendant 5 autres jours avec une famille libanaise. Ce fut bien agréable. Ils m’ont même amenée à la montagne et sont encore en extase (ou en coma diabétique…) devant la canne de sirop d’érable que je leur ai donnée pour les remercier (désolée Mathieu… elle ne s’est pas rendu jusqu’à toi). C’est également eux qui m’ont appris tout ce que je sais sur la gestion de l’électricité ahahah! J’ai maintenant un vrai chez moi. Ca s’appelle le NEST pour Near Est School of Theologie… -_- C’est une école de religion qui offre des chambres pour les étudiants… J’ai donc beaucoup de plaisir là-bas…! Il y a des petits citations religieuses partout jusque dans la salle de bain. Je partage ma chambre avec une arménienne qui est si petiteeeee! Il y a un miroir dans l’ascenseur et en me voyant à côté d’elle j’ai eu un fou rire incontrôlable. Elle comprenait rien. Bref, j’ai fait une magnifique première impression et on s’entend très bien (mais ca c’est vrai :p). Elle est très gentille. Il y a aussi tout un groupe d’allemands aux résidences, mais ils sont en Jordanie pour les vacances donc je devrais les rencontrer la semaine prochaine. Mais ce que j’aime le plus de cet endroit c’est le vieux monsieur à l’accueille qui parle strictement arabe. L’autre jour, il m’a pris dans ses bras tel l’enfant prodige de retour lorsque je lui ai bafouillé ‘’Bonjour, Comment ca va?’’ en arabe. Depuis, à chaque fois qu’on se croise, il m’apprend quelque chose de nouveau. Il m’a appris à dire ‘’je m’en vais à ___’’. Je pense que ca faisait partie d’un plan psychédélique pour suivre mes déplacements ahah. Mais bon, il est drôle et il me fait sourire et en ce moment, je n’ai envie que de cela.

Anna à l’urgence AUH (american university hospital)
Je trouve ca dure… chaque jour il y a quelque chose de difficile. Une famille qui cache au père qu’il a une tumeur au cerveau (ca a l’air que c’est ok au Liban que les familles cachent ce genre d’info… ca vous montre la place que la famille prend au liban), une jeune femme qui en est à sa deuxième tentative de suicide en avalant une bouteille de détergeant pour le plancher, des gens qui n’ont pas d’assurance et qui vont probablement mourir à cause de ca, une femme se présentant avec ascite pour découvrir que son cancer du sein a fait des métastases au foie … et le pire c’est qu’on ne peut jamais connaitre la fin de l’histoire et revoir ces patients. On n’a même pas la chance de les accompagner dans tout ce processus jusqu’au bout parce que c’est ca l’Urgence : trier, stabiliser et admettre des patients. Comme premier stage, c’est bien parce que ca bouge beaucoup et ca me permet de réviser une foule de choses, mais je ne pense pas que je pourrais faire exclusivement ca de ma vie… Il faut dire que c’est très stimulant d’avoir un trauma, mais je ne pense pas que je serais capable d’avoir une relation aussi brève avec mes patients.
Anna et la hiérarchie à l’hôpital
C’était dans mes débuts à l’hôpital. Les gens n’étaient pas encore habitués à ma présence et parlaient souvent arabe entre eux. La résidente n’avait pas l’aire de vouloir reconnaitre mon existence, les 2 internes étaient encore méfiantes à mon égard et me semblaient un peu froides, il me restaient donc les 2 étudiants en médecine. La fille semblait si tressée et j’avais l’impression de la torturer à chaque fois que je lui posais une question. Je me suis donc rabattue sur le garçon, Rey. Il était vraiment gentil, m’expliquait la vie et me traduisait tout en anglais. Je me disais qu’il fallait absolument continuer à être sur ces shifts si je voulais apprendre quelque chose. Il m’a proposé de prendre mon numéro de téléphone pour m’envoyer son horaire par message texte (erreur naïve numéro 1 de ma part…). Au lieu de me texter son horaire, il m’a texté que j’étais une ‘’attractive girl’’ et m’a demandé si j’avais un copain… j’ai tout de suite compris que je venais de perdre mon allier à l’hôpital et qu’il me faudrait malheureusement prendre mes distances. Surtout lorsqu’il m’a demandé de lui décrire la mentalité des gens au Canada sur les relations de couple et ce que je pensais du sexe avant le mariage… Bref, FML.
Je pourrais aussi vous parler de mon excursion à Byblos, Saida et Sour dans le Sud du Liban, de comment obtenir une carte étudiante en 1 journée au Liban tout en gardant son calme, de mon aventure dans une ONG d’un camp palestinien, de comment comme à chaque voyage j’ai été malade en mangeant n’importe quoi n’importe où, mais qu’un jour, mon système immunitaire sera top pour la terre entière, mais ce sera pour une autre fois. Car demain, l’urgence d’AUB a besoin de moi… NOT (le concierge est plus utile que moi ahahah). Mais ca prend des forces et une bonne nuit de sommeil pour avoir seulement l’air stupide alors qu’en fait on est trisomique ahahah :p. (je blague! Que je vois personne me faire un peptalk sur l’estime de soi…)
Je vous laisse sur une série de petites anecdotes. Je vous aime à la folie. J’espère que vous allez bien. Donnez moi de vos nouvelles.
Faits divers… et divertissant!
- Les gens conduisent leur voiture avec leur bébé dans les bras… Ca me choque beaucoup moins que quelqu’un qui fait de la moto sans casque, mais je trouvais ca quand même inusité…
- Lara Fabien devait venir faire un concert pour la St-valentin… Oui, oui… à Beyrouth! Mais semblerait-il qu’elle soit déjà allée en Israël, donc ils ont annulé son concert… pas de pitié, même pour Lara! Même pour la ST-VALENTIN!
- Je pense que mon ami américain s’est tordu de rire pendant 15 minutes quand il a réalisé que le soleil me faisait éternuer et qu’il était également possible de reproduire ce phénomène en me faisant regarder un néon…
- Aujourd’hui, un des patients à l’urgence avait pour raison de consultation ‘’ mon sperme est rose’’. J’aurais vraiment voulu retenir comment dire ca en arabe…
- J’ai remarqué que j’ai la manie de regarder les gens dans les yeux quand je les croise dans la rue. À Montréal ca change rien parce que les gens ne me regardent pas de toute façon, mais ici, je devrais vraiment arrêter de faire ca… j’ai l’impression que ca a le même effet que de flasher les gens…
- Bon… je m’améliore, mais je reste toujours un brin trisomique pour ce qui est de traverser la rue. Au Pérou, mon ami Ang me prenait la main pour être certain qu’il ne m’arrive rien et que je traverse en même temps que tout le monde tellement j’étais incompétente. Ici, des étrangers m’ont pris LA MAIN comme ca, tout bonnement, pour me faire traverser la rue avec eux. Je devais vraiment avoir un air d’une fille qui va se faire frapper par un taxi… En-tout-cas… pour l’instant je me débrouille relativement bien.
- Ma dernière erreur en anglais fut de demander à mes amis ‘’Can you merge all together?’’ pour prendre une photo de groupe. Je pense qu’ils ont ri à se faire pipi dessus… On a pris des photos de gens qui tentent de fusionner les uns avec les autres… -_- mais bon ahah! On a bien ri… de moi :p
Bizouxxx
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Encore un peu malade, mais heureuse avec les cèdres en arrière plan! |